Quand une légende s’éteint, le monde pleure une icône. Mais quand un père s’en va, une fille perd son repère, son ancrage, sa boussole. Depuis ce funeste mois de décembre 2017 où la France entière a dit adieu à Johnny Hallyday, Laura Smet a navigué dans les eaux troubles du deuil public, sous le feu incessant des projecteurs. Mais derrière l’image glacée de la dignité, se cache un volcan d’émotions. Aujourd’hui, avec une franchise désarmante et une sensibilité à fleur de peau, Laura ouvre enfin les portes de son jardin secret. Loin des batailles juridiques et des gros titres, elle nous livre la vérité sur sa relation avec ce père qui, pour elle, n’est jamais vraiment parti.

Une douleur qui ne s’efface pas, elle se transforme

“Le deuil n’est pas une blessure qui se referme, c’est un fil invisible qui tisse mon existence.” Par ces mots, Laura Smet balaie d’un revers de main l’idée reçue selon laquelle le temps guérit toutes les blessures. Pour la fille du Taulier, la douleur de l’absence n’a pas diminué ; elle a simplement changé de forme. Elle est passée d’un cri déchirant à un murmure constant, une compagne de route avec laquelle elle a appris à vivre.

Dans ses récentes confidences, Laura décrit un quotidien où la mélancolie côtoie la consolation. Elle ne cherche pas à fuir la tristesse. Au contraire, elle l’embrasse, car cette tristesse est la preuve vivante de l’amour immense qui l’unissait à son père. Elle parle de ses larmes sans honte, de ces moments de solitude où le vide semble vertigineux, mais aussi de cette résilience incroyable qui la pousse à se lever chaque matin. Elle n’est plus seulement “la fille de” ; elle est une femme debout, forgée par l’épreuve, portant ses cicatrices comme des médailles invisibles.

Conversations avec l’Invisible : Quand Johnny répond

C’est sans doute la partie la plus troublante et la plus magnifique de son témoignage. Laura Smet ne parle pas de son père au passé. Pour elle, la mort n’a été qu’un passage, une transition vers une autre forme de présence. Elle raconte, avec une conviction qui force le respect, comment Johnny continue d’habiter son quotidien.

Ce ne sont pas de simples souvenirs, mais des expériences sensorielles, presque mystiques. Un parfum familier qui surgit de nulle part, une mélodie de rock qui résonne à un moment précis, un rayon de soleil qui traverse une pièce sombre… Pour Laura, ce ne sont pas des coïncidences. Ce sont des signes. “Je lui parle, et je sens qu’il m’écoute vraiment”, confie-t-elle.

Elle décrit un dialogue silencieux mais ininterrompu. Johnny est devenu son guide spirituel, une force invisible qui l’apaise quand elle doute et la pousse en avant quand elle flanche. Cette connexion surnaturelle est son secret le mieux gardé, sa source de force inépuisable. Elle nous rappelle que les liens du sang et du cœur sont plus forts que la fatalité de la mort. Johnny n’est plus sur scène, mais il dirige encore la bande originale de la vie de sa fille.

L’Art comme exutoire et comme prière

Si la parole est parfois difficile, l’art, lui, ne ment jamais. Laura a choisi de canaliser son chagrin dans la création, transformant sa peine en beauté. Le clip vidéo qu’elle a réalisé pour la chanson Appelle-moi Johnny de Pascal Obispo n’est pas un simple projet professionnel. C’est une lettre d’amour visuelle, une prière envoyée vers le ciel.

Dans cette œuvre, chaque plan, chaque lumière, chaque regard est codé. C’est une conversation intime qu’elle offre au public, sans voyeurisme, mais avec une authenticité brute. Elle s’y met en scène, vibrante, fragile et puissante à la fois, recréant par l’image cette complicité perdue. “Je ne me contente pas de me souvenir, je crée un espace de guérison”, explique-t-elle. L’art devient alors le seul lieu où elle peut retrouver son père, le temps d’une chanson, le temps d’un tournage. C’est sa manière à elle de le faire revivre, de refuser l’oubli, de graver son image non pas dans le marbre froid, mais dans la lumière chaude du cinéma.

La Gardienne du Temple face aux loups

Mais ne vous y trompez pas : la fragilité de Laura cache une guerrière redoutable. Si elle accepte de pleurer, elle refuse de se laisser faire. Depuis la disparition de Johnny, elle s’est érigée en gardienne farouche de son héritage moral. Alors que les vautours rôdent et que les polémiques familiales ont souvent sali la mémoire du rockeur, Laura se dresse comme un rempart.

Elle refuse catégoriquement que l’image de son père soit instrumentalisée, déformée ou caricaturée pour des profits ou des règlements de compte. “Je me battrai pour que Johnny reste fidèle à l’homme qu’il était”, martèle-t-elle. Ce combat, elle le mène avec une dignité royale. Pas de scandales inutiles, mais une fermeté inébranlable. Elle veut protéger l’artiste, mais surtout l’homme, le père tendre et aimant que le public ne connaissait pas toujours. Cette mission est lourde, parfois écrasante, mais elle l’assume comme un devoir sacré. Elle est la garante de la vérité, celle qui veille sur la flamme pour qu’elle ne vacille jamais.

Une leçon de vie universelle

Au-delà de la célébrité, au-delà du mythe Hallyday, l’histoire de Laura Smet est celle de toutes les filles qui ont perdu leur papa. Elle nous tend un miroir bouleversant sur notre propre rapport au deuil. Elle nous apprend qu’il n’y a pas de “bonne” façon d’être triste, qu’on a le droit de parler aux fantômes, et que l’amour ne s’arrête pas quand le cœur cesse de battre.

Laura Smet n’est pas une victime. Elle est une survivante magnifique qui a réussi l’impossible alchimie : transformer le plomb du chagrin en or pur. Elle nous prouve que les morts ne meurent vraiment que lorsqu’on les oublie. Et grâce à elle, grâce à cet amour fou et inconditionnel qu’elle porte comme un étendard, Johnny Hallyday est plus vivant que jamais. Il est là, dans chaque larme séchée, dans chaque sourire retrouvé, dans chaque note de musique qui flotte dans l’air. Laura a fait de sa vie un mausolée vivant, vibrant et lumineux, où son père règne pour l’éternité.