En politique, les mots sont des armes. Une phrase bien placée, un élément de langage répété au bon moment, peut faire basculer une élection, détruire une réputation ou, plus subtilement, redessiner entièrement le paysage des alliances et des oppositions. Ces dernières années, une expression, simple mais dévastatrice, a émergé de la bouche du président du Rassemblement National, Jordan Bardella, pour s’imposer comme un véritable poison rhétorique : l’accusation d’être la “béquille de Macron”.
Cette phrase, qui donne son titre à la vidéo “Vous serez la béquille de Macron !” : La prédiction de Bardella qui a TOUT changé”, n’est pas qu’une simple invective. C’est le cœur d’une stratégie politique brillante et cynique, méticuleusement déployée pour atteindre un objectif précis : installer le Rassemblement National comme l’unique et véritable alternative à Emmanuel Macron, en disqualifiant méthodiquement tous les autres acteurs de l’opposition. L’histoire de cette “prédiction” est celle d’une reconfiguration sémantique du pouvoir et de l’opposition.
Pour comprendre l’impact de cette formule, il faut revenir à ses origines, notamment aux élections législatives de 2022. La France est alors politiquement fracturée. Emmanuel Macron vient d’être réélu, mais sans majorité absolue à l’Assemblée Nationale. Deux forces d’opposition principales émergent : la NUPES, l’alliance des gauches menée par Jean-Luc Mélenchon, et le Rassemblement National, qui a réalisé une percée historique.
C’est dans ce contexte que Jordan Bardella commence à aiguiser son arme. Face à une NUPES qui se positionne comme le premier bloc d’opposition parlementaire, le jeune leader du RN lance l’attaque : Jean-Luc Mélenchon, malgré ses diatribes enflammées contre le “monarque présidentiel”, ne serait en réalité que sa “béquille”.
L’accusation est perfide. Elle sous-entend que l’opposition de la gauche radicale n’est qu’un simulacre, un chaos organisé qui, en fin de compte, sert les intérêts du Président. En se montrant “irresponsable”, “extrémiste” et “bruyante”, la NUPES permettrait à Emmanuel Macron de se poser en seul garant de l’ordre et de la stabilité. “La Nupes, béquille d’Emmanuel Macron, s’est disloquée au lendemain du second tour”, déclarait Bardella en juin 2022, affirmant que le RN était désormais la “première force d’opposition dans les urnes” et à l’Assemblée.

L’objectif est double. D’une part, il s’agit de décrédibiliser la NUPES auprès de son propre électorat, en insinuant une connivence secrète avec le pouvoir. D’autre part, cela permet au RN de se présenter comme une opposition “crédible”, “sérieuse” et “constructive”, tout en étant radicalement opposée au projet présidentiel. Bardella ne se contente pas d’attaquer Macron ; il attaque celui qui prétend être son principal adversaire. “Jean-Luc Mélenchon n’est pas l’opposant mais la béquille d’Emmanuel Macron”, martelait-il sur les plateaux de télévision.
Cette stratégie de la “béquille” est d’une efficacité redoutable car elle joue sur la confusion et la défiance croissante des citoyens envers la classe politique. Elle transforme le débat politique en un théâtre d’ombres où seules deux forces compteraient réellement : le “bloc central” macroniste et le “bloc national” incarné par le RN. Tous les autres, qu’ils soient de gauche ou de droite traditionnelle, sont relégués au rang de simples supplétifs, de “béquilles” involontaires ou complices du système.
Mais l’arme rhétorique est flexible. Si elle a d’abord visé la gauche, elle sera redéployée avec tout autant de force contre la droite traditionnelle, Les Républicains (LR).
Après la dissolution de l’Assemblée Nationale en juin 2024, suite au triomphe du RN aux élections européennes, le paysage politique est à nouveau bouleversé. Emmanuel Macron est affaibli. La droite LR est en lambeaux, divisée sur la stratégie à adopter. C’est le moment que choisit Jordan Bardella pour réactiver sa formule, mais en changeant de cible.
Cette fois, ce sont Les Républicains qui sont accusés d’être la “béquille” potentielle d’un gouvernement macroniste en détresse. “J’appelle les Républicains à cesser d’être la béquille politique d’Emmanuel Macron,” lance-t-il, tout en tendant la main à une partie de leurs élus. L’accusation avait déjà été testée par le passé. En janvier 2023, Bardella observait déjà avec ironie que “LR, qui était la béquille du gouvernement… est enfin entré dans la majorité présidentielle”.
En 2024, l’attaque est encore plus puissante. Elle vise à achever un parti déjà moribond en le plaçant devant un choix impossible : soit s’allier avec le RN et renier ses principes fondateurs, soit s’allier ou du moins soutenir la majorité présidentielle et confirmer ainsi l’accusation de Bardella. En se positionnant comme la seule force capable de gouverner face à “l’impuissance” du bloc central, Bardella utilise l’argument de la “béquille” pour aspirer l’électorat de droite, déçu par les atermoiements de ses dirigeants.
La “prédiction” qui a “tout changé” n’est donc pas une voyance, mais une stratégie de communication politique consciente et répétée. Le “changement” réside dans l’efficacité avec laquelle cette simple phrase a réussi à polariser le débat public, non plus entre une gauche et une droite traditionnelles, mais entre un “système” (Macron et ses béquilles, de gauche comme de droite) et une “alternative” (le Rassemblement National).
Cette rhétorique a plusieurs avantages pour le RN.

Premièrement, elle est simple et facile à comprendre. L’image de la “béquille” est immédiatement parlante : elle évoque la faiblesse, la dépendance, le manque d’autonomie. Celui qui a besoin d’une béquille est infirme ; celui qui est la béquille n’a pas d’existence propre, il ne sert qu’à soutenir un autre. L’image est humiliante pour celui qui en est la cible.
Deuxièmement, elle est adaptable. Comme nous l’avons vu, elle a été utilisée avec succès contre Mélenchon puis contre Les Républicains. Elle peut, en théorie, être appliquée à quiconque s’oppose au RN sans être Emmanuel Macron.
Troisièmement, elle crée une prophétie auto-réalisatrice. En forçant ses adversaires à se positionner par rapport à Macron, Bardella les piège. S’ils votent une loi avec le gouvernement (comme la réforme des retraites pour LR), ils deviennent la “béquille”. S’ils s’opposent de manière jugée trop radicale (comme la NUPES), ils deviennent la “béquille” en faisant le jeu du chaos qui renforce Macron. Dans tous les cas, Bardella gagne.
Enfin, et c’est peut-être le plus important, cette rhétorique permet au RN de compléter sa “dédiabolisation” par une “présidentialisation”. En rejetant lui-même l’étiquette de “béquille” (“Nous n’avons pas vocation à être la béquille d’Emmanuel Macron,” affirmait-il dès 2022), Bardella se pose en force autonome, souveraine, et prête à gouverner. Il n’est plus le contestataire permanent ; il est le successeur en attente.
En conclusion, l’expression “Vous serez la béquille de Macron” est bien plus qu’un slogan. C’est une véritable technologie politique. Elle a servi de levier au Rassemblement National pour briser le “plafond de verre” et s’installer au cœur du jeu politique français. En dénonçant les “béquilles”, Jordan Bardella a réussi à se défaire de ses propres entraves rhétoriques pour apparaître comme le seul adversaire debout, face à un président affaibli et entouré d’alliés de circonstance.
La vidéo qui porte ce titre capture l’essence de cette transformation. Le “tout” qui a changé, c’est la perception même de l’opposition. Le combat n’est plus un triangle ou un quadrilatère ; c’est un duel. Et dans ce duel, Bardella a réussi, par la force des mots, à convaincre une partie croissante des Français qu’il était le seul challenger crédible, tandis que tous les autres n’étaient, au fond, que les béquilles d’un système à bout de souffle.
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