Dans le tumulte assourdissant qui a suivi le départ de l’idole, la France s’est cherchée un réconfort. La voix de Johnny Hallyday, ce roc, ce phare dans la nuit pour des millions de fans, s’était tue. Et puis, comme un écho venu d’ailleurs, une autre voix s’est élevée. Identique. Troublante. Bluffante. Celle de Jean-Baptiste Guégan. Un homme simple, un Breton discret, qui a remporté “La France a un incroyable talent” et qui, depuis, ne cesse de remplir des Zéniths avec un seul don : faire revivre “la voie de Johnny”.

Mais ce phénomène, aussi populaire soit-il, naviguait en eaux troubles. Car l’héritage Hallyday, on le sait, est un champ de mines. Depuis 2017, une guerre de succession, à la fois légale et médiatique, fait rage. D’un côté, Laeticia Hallyday, la veuve, gardienne officielle du temple et de l’image. De l’autre, les aînés, David Hallyday et Laura Smet, les enfants “déshérités”, soutenus par leur mère respective, Sylvie Vartan et Nathalie Baye.

Dans cette bataille de légitimité, la question de l’hommage se pose. Qui a le droit de célébrer Johnny ? Qui est “officiel” et qui ne l’est pas ? Jean-Baptiste Guégan, avec son succès foudroyant, est devenu, bien malgré lui, un enjeu. Un symbole. Sa voix est-elle un hommage sincère ou une usurpation ? Est-il un simple “sosie” ou le dépositaire de l’âme du rockeur ?

Pendant des mois, le “clan” Hallyday est resté relativement discret à son sujet. Si Laeticia, de par sa position, ne pouvait décemment pas adouber un “double” qui lui échappait, l’avis des aînés était, lui, particulièrement attendu. Sylvie Vartan, la première, avait ouvert la voie, se disant “ravie de son succès”. Puis David Hallyday, le fils, le musicien, avait lui-même validé le talent du jeune homme. Interrogé sur cette voix si similaire à celle de son père, David avait confié être “assez bluffant”, saluant une “tonalité de voix très ressemblante” et s’étonnant qu’on ne l’ait “découvert que maintenant”.

Pour Jean-Baptiste Guégan, ces mots furent un soulagement. “Il a compris que je faisais ça sincèrement, avec amour et humilité”, avait-il réagi, touché. Mais il manquait une pièce au puzzle. Une voix essentielle dans ce concert de louanges : celle de Laura Smet. La fille. L’artiste sensible, la comédienne à fleur de peau, si proche de son père. Que pensait-elle de cet homme qui, chaque soir, ressuscitait le timbre et l’énergie de celui qui lui manquait tant ?

Le mystère vient d’être levé, et ce, par l’entremise d’un homme qui connaît mieux que personne les arcanes de la famille : Bernard Montiel. L’animateur, ami intime et confident de Laura et David, recevait justement Jean-Baptiste Guégan au micro de RFM. L’interview, bienveillante, a porté sur le succès de son album, sa tournée, et son rapport à Johnny. Inévitablement, la question des aînés Hallyday est revenue sur le tapis.

Avec une humilité qui le caractérise, Jean-Baptiste Guégan a réitéré sa gratitude envers David. Puis, Bernard Montiel, qui n’ignore rien des liens qui unissent le frère et la sœur, lui a posé la question que tout le monde attendait : “Aimeriez-vous rencontrer Laura Smet ?”

La réponse du chanteur fut empreinte de pudeur et de respect. Pas de revendication, pas de demande insistante. Juste un souhait, murmuré presque timidement : “J’aimerais bien, si la porte s’ouvre…”

C’est à cet instant que Bernard Montiel, le sourire en coin de celui qui détient un secret, a décidé de faire un cadeau à son invité. L’animateur, en sa qualité d’ami de la famille, a alors fait sa “révélation”. Une “petite information”, glissée comme une confidence, qui a dû faire l’effet d’une bombe de joie dans le cœur de Guégan. Montiel a révélé ce que Laura Smet pensait réellement de lui.

Et l’avis de Laura, à l’instar de celui de son frère David, est plus que positif. Sans entrer dans les détails précis de la conversation qu’il a eue avec elle, Bernard Montiel a fait comprendre que la comédienne était elle aussi touchée et bluffée par le phénomène. Loin de voir en lui un usurpateur, elle verrait, comme son frère, un artiste sincère qui fait perdurer la flamme avec respect. Une information qui, selon la presse, “ravira” sans nul doute le principal intéressé.

Cet adoubement, car c’en est un, est tout sauf anodin. Il est lourd de sens et de symbole dans le contexte actuel. En validant le travail de Jean-Baptiste Guégan, le “clan” David et Laura envoie un message puissant. Ils disent au public : “Voici l’héritage que nous aimons. Un héritage vivant, populaire, accessible, porté par un homme simple qui ne cherche pas la gloire pour lui-même mais pour la musique.”

C’est aussi, et peut-être surtout, une manière de reprendre la main sur le “récit” Hallyday. Alors que Laeticia contrôle l’héritage matériel, les droits, les albums posthumes officiels et les expositions, David et Laura, en soutenant Guégan, soutiennent l’héritage immatériel. La voix. L’émotion brute. Ils choisissent de s’allier avec “la voix du peuple”, cet artiste que les fans ont plébiscité par millions, en dehors de tout circuit officiel.

En adoubant Guégan, ils ne font pas que valider un chanteur ; ils valident une forme d’hommage qui échappe totalement au contrôle de leur belle-mère. C’est un geste d’une intelligence stratégique redoutable : ils se placent du côté des fans, du côté de l’émotion pure, là où Laeticia est souvent perçue comme étant du côté du business et de l’image contrôlée.

Jean-Baptiste Guégan, lui, continue de tracer sa route, avec une prudence de Sioux. Conscient du terrain glissant sur lequel il marche, il s’est toujours gardé de prendre parti. “Je n’ai rien contre Laeticia Hallyday”, a-t-il déjà déclaré, cherchant à calmer le jeu. Il ne veut pas être l’instrument d’une guerre qui n’est pas la sienne. Il veut juste chanter.

Mais le destin en a décidé autrement. Sa voix, ce don du ciel, l’a propulsé au centre d’une saga familiale qui le dépasse. Il n’est plus seulement Jean-Baptiste Guégan, le Breton qui chante Johnny. Il est devenu, aux yeux du public et désormais du clan Smet-Hallyday, le “continuateur”.

La révélation de Bernard Montiel n’est donc pas une simple anecdote people. C’est un acte politique dans la géopolitique du clan Hallyday. C’est la confirmation que pour David et Laura, l’héritage de leur père ne se trouve pas seulement dans un coffre-fort ou sur un testament. Il est dans l’air, sur les ondes, dans la voix de cet homme qui, “si la porte s’ouvre”, pourrait bien devenir un ami de la famille. La porte, semble-t-il, est désormais grande ouverte.