Mercredi matin dans sa maison du Vaucluse, Patrice Laffont, légende de la télévision française, s’est éteint à 84 ans – Que retiendra-t-on de l’homme derrière Fort Boyard et Des chiffres et des lettres ? Et surtout, quels liens profonds et parfois surprenants unissaient cet animateur iconique à Nagui, son successeur spirituel et ami de longue date ? Entre admiration mutuelle, passages de témoin et confidences hors caméra, l’histoire entre les deux hommes en dit long sur la transmission dans le monde des médias… Cliquez sur le lien pour lire la suite.

C’est un matin calme de juillet qui a vu s’éteindre une voix, un regard, une silhouette familière. Patrice Laffont, figure emblématique du petit écran français, est décédé mercredi matin dans sa maison du Vaucluse, à l’âge de 84 ans. Celui qui avait marqué des générations de téléspectateurs avec des émissions cultes comme Fort Boyard, Des chiffres et des lettres ou encore Pyramide, laisse derrière lui une carrière exceptionnelle… et une trace indélébile dans le cœur de ses collègues, notamment Nagui.

Si les deux hommes n’étaient pas de la même génération – Patrice étant né en 1939, Nagui en 1961 – leur trajectoire s’est souvent croisée, au fil des plateaux, des studios, mais surtout au fil d’une amitié profonde, discrète, et respectueuse. L’un, vétéran de l’ORTF, l’autre enfant de la FM et des années 90, mais tous deux portés par une passion commune : celle de faire vibrer, rire, réfléchir, et rêver le public français.

Patrice Laffont n’a jamais cessé d’être un repère. Pour Nagui, il représentait bien plus qu’un “ancien” : il était un guide. “Patrice avait cette élégance naturelle, cette voix posée et cette capacité à captiver sans jamais écraser. Il m’a appris qu’animer, ce n’est pas parler fort. C’est écouter,” confiait Nagui dans une interview accordée à Télé 7 Jours en 2017, lors des 70 ans de la télévision française.

Les hommages ne tardent pas à affluer. Mais celui de Nagui, sobre et plein d’émotion, se distingue. Sur ses réseaux sociaux, l’animateur écrit simplement : “Patrice Laffont n’a jamais cherché à briller plus que les autres. Il a éclairé les autres. Et moi, il m’a montré le chemin.”

Ce chemin, justement, a été souvent pavé de parallèles. Lorsque Nagui prenait les commandes de jeux comme Taratata ou N’oubliez pas les paroles, beaucoup y voyaient une relève moderne de la tradition des grands animateurs de culture et de divertissement incarnée par Laffont. Bien loin de la rivalité, les deux hommes ont toujours cultivé une admiration mutuelle.

En 2009, Patrice Laffont avait même accepté de venir faire une apparition surprise dans Taratata, saluant “le travail remarquable de Nagui pour faire exister la musique à la télévision dans un monde où elle disparaît peu à peu.” Cette reconnaissance n’était pas feinte. “Nagui ose. Et il ose intelligemment,” affirmait-il dans une interview. “Il n’a pas besoin d’imiter les anciens. Il a compris l’essentiel : rester sincère.”

Les deux hommes partageaient aussi une certaine vision de la télévision : populaire mais exigeante, accessible mais jamais vulgaire. Tous deux ont défendu l’idée que l’on pouvait faire de la télévision “de compagnie” – celle qu’on regarde avec le cœur, pas seulement avec les yeux. Une télévision dans laquelle l’animateur n’est pas une star, mais un passeur.

Lors d’un dîner organisé par France Télévisions en 2016, à l’occasion d’un hommage à Fort Boyard, Patrice Laffont avait glissé une anecdote touchante : “Un jour, un enfant m’a dit : ‘Toi, t’es le monsieur qui fait pas peur à la télé’. C’est le plus beau compliment qu’on puisse recevoir. Et j’ai dit à Nagui de viser ça aussi.”

Au fil des années, leur lien s’est renforcé, non pas à coups de déclarations publiques, mais par de simples gestes : un appel, un SMS après une émission, une discussion en coulisses. Lorsque Patrice s’est retiré peu à peu du devant de la scène, c’est Nagui qui a pris le relais sans jamais renier ce qui avait été construit avant lui. Il n’a jamais prétendu “réinventer” le genre, mais toujours s’inscrire dans une continuité.

La disparition de Patrice Laffont marque donc la fin d’une époque. Celle des premiers jeux télévisés en noir et blanc, des émissions enregistrées sans filet, des animateurs qui parlaient doucement et qui laissaient le silence respirer. Une époque où le mot “audimat” ne dictait pas encore tout, et où le sourire d’un animateur suffisait à fédérer toute une famille devant l’écran.

Mais au-delà de la nostalgie, il y a la reconnaissance. Celle d’un homme qui, sans tapage, a contribué à élever le niveau de la télévision française. Et dans cette reconnaissance, la voix de Nagui résonne plus fort que jamais.

Dans une interview impromptue à la radio ce jeudi matin, Nagui a conclu d’une voix légèrement tremblante : “Patrice m’a appris qu’on pouvait durer à la télé sans se trahir. Il m’a appris à respecter les gens, à respecter le silence, et à ne jamais oublier qu’un bon animateur, c’est d’abord un homme de l’ombre, au service des autres.”

Ce mercredi, dans le calme de sa maison du Vaucluse, Patrice Laffont s’est éteint entouré des siens. Mais dans le cœur de Nagui, et de millions de Français, il continue d’éclairer nos souvenirs d’enfance, nos fins de soirée, et nos premiers sourires devant l’écran.

Patrice Laffont est parti. Mais il n’a pas disparu. Car ceux qui nous ont appris à regarder le monde autrement ne s’éteignent jamais vraiment.