« Ce n’est pas bien, personne ne rit » : en 1997, Nagui a tenté une incursion inattendue dans le monde du cinéma en acceptant un rôle principal, persuadé que son humour et sa notoriété allaient séduire les spectateurs. Mais ce fut une douche froide. Entre critiques acerbes, salles vides et désillusion personnelle, cette expérience oubliée a laissé une trace bien plus profonde qu’on ne l’imagine. Pourquoi Nagui ne parle-t-il presque jamais de ce passage ? Que s’est-il réellement passé sur le tournage ? Une chute cuisante derrière les rires. Cliquez sur le lien pour en savoir plus.

“Ce n’est pas bien, personne ne rit” : l’échec cinématographique que Nagui préfère oublier

Nagui, c’est avant tout la télévision. Animateur charismatique, drôle, intelligent, il a su s’imposer depuis les années 1990 comme une figure incontournable du paysage audiovisuel français. Pourtant, peu de gens savent qu’en 1997, porté par sa notoriété grandissante, il a tenté une aventure bien différente : le cinéma. Une tentative vite oubliée par le grand public… mais pas par lui.

Tout commence en 1996. À l’époque, Nagui est au sommet. Il cartonne avec « N’oubliez pas votre brosse à dents », devient une star de la télévision française, et voit s’ouvrir à lui des portes qu’il n’aurait jamais imaginées quelques années auparavant. C’est alors qu’un projet insolite lui est proposé : jouer le rôle principal dans une comédie française légère, pensée comme un croisement entre humour populaire et satire sociale. Convaincu par le scénario et surtout par le défi, Nagui accepte.

Le film s’intitule Une époque formidable ? Pas vraiment…, un titre qui, rétrospectivement, résonne presque comme une ironie. Il s’agit d’une comédie au ton décalé, racontant l’histoire d’un animateur télé fictif, narcissique et perdu dans sa propre célébrité. L’ironie est frappante, car le personnage n’est pas sans rappeler certains traits que Nagui a lui-même moqués dans ses émissions.

Pourtant, dès les premières projections tests, le malaise est palpable. Les rires ne fusent pas. Les dialogues, pourtant conçus pour faire mouche, tombent à plat. Le jeu d’acteur de Nagui est jugé “figé”, “maladroit”, voire “involontairement caricatural” par certains critiques. À la sortie officielle, le verdict est sans appel : un échec cuisant.

Le film ne restera que deux semaines à l’affiche dans une poignée de salles. Les critiques sont sévères. Libération écrit : “Nagui tente le grand écart, mais se déchire en route.” Le Parisien parle d’”un téléfilm gonflé au budget cinéma”, et Les Cahiers du Cinéma n’y consacrent même pas une ligne. Pire encore, dans l’émission « Le Masque et la Plume », un critique lâche une phrase devenue tristement célèbre : « Ce n’est pas bien, personne ne rit. »

Pour Nagui, le coup est dur. Lui qui s’est toujours protégé derrière l’humour ressent cette déconvenue comme une blessure d’ego, mais surtout comme une remise en question de sa légitimité en dehors du petit écran. En privé, il confiera à un proche : « J’ai cru que ma notoriété suffisait. J’ai oublié qu’au cinéma, ce sont les personnages qui comptent, pas l’image. »

Ce passage au cinéma, Nagui ne l’évoque quasiment jamais en public. Dans de rares interviews, il parle pudiquement d’”une expérience formatrice” ou “d’une erreur de jeunesse”. Il ne renie pas, mais il n’assume pas non plus pleinement. Ce silence en dit long sur la blessure qu’il a portée. Certains proches affirment même qu’il aurait refusé d’autres propositions après ce revers, préférant se concentrer sur ce qu’il savait faire de mieux : la télé.

Mais cette mésaventure n’a pas été vaine. Au contraire, elle a façonné le Nagui que nous connaissons aujourd’hui. Loin de s’acharner dans une voie incertaine, il a su rebondir avec une lucidité admirable. Quelques mois seulement après l’échec du film, il revient sur France 2 avec des projets forts : « Taratata », qu’il relance avec une ambition renouvelée, ou encore « Tout le monde veut prendre sa place », qui deviendra un rendez-vous quotidien incontournable. Il affine son image, travaille davantage ses émissions, et se forge une réputation de perfectionniste rigoureux.

Surtout, il développe une philosophie que l’on retrouve dans nombre de ses déclarations : “Je ne fais plus rien pour être aimé. Je fais ce que j’estime juste.” Une phrase qui sonne comme un écho à l’humiliation de 1997. Il ne cherche plus à séduire tous les publics, ni à conquérir tous les terrains. Il choisit. Il construit. Il contrôle.

Aujourd’hui encore, lorsque l’on évoque son échec au cinéma, rares sont ceux qui s’en souviennent. Et c’est peut-être ce qu’il a réussi de plus fort : transformer un moment de honte en tremplin discret pour la suite. Il aurait pu s’effondrer, sombrer dans le cynisme ou la rancœur. Il a préféré apprendre.

Peut-être qu’au fond, ce film raté lui a permis de mieux comprendre la frontière entre popularité et crédibilité. Il a su redéfinir sa place, non pas comme un touche-à-tout, mais comme un pilier stable du divertissement français. Et c’est précisément cette lucidité, forgée dans la douleur d’un échec, qui fait aujourd’hui de lui un personnage respecté, bien au-delà de ses seuls talents d’animateur.

Ce que l’histoire de Une époque formidable ? Pas vraiment… nous apprend, ce n’est pas seulement qu’il est difficile de passer d’un média à l’autre. C’est surtout que même les figures les plus souriantes de la télé ont connu des moments de doute, de solitude et de remise en question. Derrière le succès, il y a souvent des cicatrices invisibles. Et derrière les échecs, parfois, des renaissances spectaculaires.