😮 Un film pour vivre sa propre mort ? C’est le pari fou d’Oliver Laxe avec “Sirat”. Le cinéaste-chaman vous emmène dans un voyage mystique au cœur du désert pour vous confronter à votre propre finitude. 🔥 Une œuvre puissante et radicale qui secoue le spectateur. Curieux de comprendre comment le cinéma peut provoquer une telle expérience ? Plongez dans notre analyse complète en commentaire ! 👇

On l’avait aperçu au Festival de Cannes, en mai, lors d’une rencontre en soutien à Gaza, avant de le retrouver le soir du palmarès, recevant le Prix du jury (ex-aequo) pour son quatrième long-métrage, le fulgurant Sirat, road-movie tourné dans le désert du Maroc avec Sergi Lopez et une bande de teufeurs le prix était partagé avec Sound of Falling, de l’Allemande Mascha Schilinski.

Le 24 mai, lors de la cérémonie de clôture, le grand public découvrait Oliver Laxe, réalisateur franco-espagnol, né en 1982 à Paris. Silhouette XXL, élégance minimaliste, cascade de cheveux bruns au milieu du dos, discours pacificateur. Ajoutons un langage créatif : il parle bien français, tout en inventant des mots tirés de l’espagnol. Chauffeur de taxi devient « taxiste », oracle « oracule », etc.

Le cinéaste a quelque chose d’un thérapeute, qui dit vouloir « prendre soin des spectateurs », en les amenant à « regarder à l’intérieur d’eux-mêmes » – sirat, en arabe, renvoie à l’image d’un pont que l’on traverse pour accéder au paradis. « J’ai pratiqué diverses psychothérapies, basées notamment sur la mémoire du corps et des douleurs passées. Je suis d’une génération sans référence spirituelle. J’ai vécu des moments de désarroi, de vide. L’art m’a un peu réchauffé le cœur », explique le réalisateur, qui a grandi à Paris avec ses parents, immigrés espagnols et gardiens d’immeuble dans le 16e arrondissement, avant des études de communication visuelle à l’université Pompeu Fabra, à Barcelone.

Le cinéma d’Oliver Laxe n’a jamais été une simple distraction. C’est une porte d’entrée vers un autre monde, une expérience quasi mystique qui saisit le spectateur pour le confronter à la puissance brute de la nature et à sa propre intériorité. Avec son nouveau projet tant attendu, provisoirement intitulé “Sirat”, le réalisateur franco-espagnol pousse son art à son paroxysme. Tourné dans les paysages arides et majestueux du Maroc, ce film n’est pas une histoire que l’on regarde, mais une épreuve que l’on traverse. Dans un entretien rare, Laxe livre la clé de son œuvre : “Dans ‘Sirat’, le spectateur expérimente sa mort, sa petitesse”. Une promesse radicale qui annonce un choc cinématographique majeur.

“Sirat” : un pont entre la vie et la mort

Le titre lui-même, “Sirat”, est lourd de sens. Dans la tradition islamique, le “Sirat” est le pont, plus fin qu’un cheveu et plus tranchant qu’une épée, que les âmes doivent traverser le jour du jugement dernier pour atteindre le paradis. En choisissant ce nom, Oliver Laxe ne fait pas mystère de ses intentions : son film est un rite de passage, un voyage initiatique qui explore la frontière ténue entre la vie et l’au-delà.

Le récit suit des personnages en quête de transcendance dans un désert qui est bien plus qu’un simple décor. Le désert, chez Laxe, est un personnage à part entière. C’est un espace de dépossession, un lieu où l’homme, dépouillé de tous ses artifices sociaux, est forcé de se confronter à l’essentiel : sa propre vulnérabilité, sa propre finitude. “Le désert est un maître spirituel”, explique le réalisateur. “Il vous vide, il vous nettoie. Face à son immensité, vous ne pouvez que ressentir votre propre petitesse. Et c’est dans cette petitesse que peut naître une forme de grandeur, d’humilité”.

C’est cette expérience physique et métaphysique que Laxe veut imprimer sur la pellicule et transmettre au spectateur. Il ne s’agit pas de filmer la mort de manière narrative ou dramatique, mais de créer les conditions sensorielles pour que celui qui regarde puisse ressentir, dans sa chair, le vertige de sa propre mortalité.

Un cinéma de l’immersion et de la transe

Pour atteindre un tel objectif, Oliver Laxe déploie un style cinématographique unique, qui tient autant du documentaire que de la fiction poétique. Connu pour travailler avec des acteurs non professionnels, il recherche une vérité brute, une authenticité qui crève l’écran. Ses films précédents, comme “Mimosas” (Grand Prix de la Semaine de la Critique à Cannes en 2016) ou le sublime “Viendra le feu” (Prix du Jury Un Certain Regard en 2019), témoignaient déjà de cette quête.

Dans “Sirat”, cette approche est poussée encore plus loin. La caméra de Laxe se fait organique, elle respire au rythme des personnages et des paysages. Les longs plans contemplatifs, la puissance sonore du vent et des silences, le jeu sur la lumière écrasante du soleil… tout concourt à créer un état de transe, une immersion totale. L’idée est de court-circuiter l’intellect pour parler directement aux sens et à l’âme.

“Je ne veux pas que le public réfléchisse au film, je veux qu’il le ressente”, insiste le cinéaste. “L’expérience de la mort n’est pas une idée, c’est une sensation. C’est la prise de conscience de notre fragilité. En plaçant le spectateur dans cette position, face à des forces qui le dépassent, je l’invite à un lâcher-prise. C’est une invitation à accepter notre condition de mortel, non pas avec angoisse, mais avec une forme de paix et de lucidité”.

Un acte de résistance spirituelle

À une époque saturée d’images rapides, de récits formatés et de divertissements superficiels, le cinéma d’Oliver Laxe apparaît comme un acte de résistance. Il nous rappelle que l’art peut encore être un puissant outil de transformation intérieure. En nous invitant à “expérimenter notre mort”, il ne nous propose pas un spectacle morbide, mais au contraire, une vibrante célébration de la vie.

Car c’est seulement en prenant conscience de notre finitude que nous pouvons véritablement apprécier la préciosité de chaque instant. C’est en ressentant notre “petitesse” face à l’immensité de l’univers que nous pouvons nous reconnecter à quelque chose de plus grand que nous. “Sirat” s’annonce donc comme bien plus qu’un film : une méditation, une prière, une expérience chamanique qui laissera des traces profondes et durables. Oliver Laxe, en cinéaste-poète, nous tend un miroir non pas pour voir notre reflet, mais pour entrevoir l’infini qui sommeille en nous. Un voyage dont on ne reviendra pas tout à fait indemne, mais sans doute un peu plus vivant.