Une sortie scénarisée jusqu’au bout
Ce 14 juillet 2025, la télévision française a perdu l’une de ses figures les plus marquantes. Thierry Ardisson, l’homme en noir, est décédé à l’âge de 76 ans, des suites d’un cancer du foie. Fidèle à son personnage, l’animateur, producteur et intervieweur hors pair a orchestré sa sortie comme une mise en scène digne de ses plus grandes heures télévisuelles. À sa manière : élégante, provocante et profondément personnelle.

C’est par un communiqué transmis à l’AFP que son épouse, la journaliste Audrey Crespo-Mara, et ses enfants ont annoncé la triste nouvelle. “Thierry Ardisson est décédé, entouré des siens, à 76 ans, d’un cancer du foie, ce lundi 14 juillet, à Paris”, ont-ils écrit. Une date hautement symbolique, choisie par l’intéressé lui-même, qui avait depuis longtemps exprimé son désir de quitter ce monde un jour de Fête nationale. Un choix qui ne doit rien au hasard, tant Ardisson aimait jouer avec les symboles, les traditions et les figures de style.

Une volonté affirmée depuis deux décennies
Ce souhait de mourir un 14 juillet, Ardisson l’avait formulé dès 2005, dans une conversation avec la journaliste Isabelle Morini-Bosc. L’homme de télévision se disait royaliste dans l’âme, et voyait dans cette date une forme d’ironie ultime, un clin d’œil à son attachement aux valeurs d’un autre temps, mais aussi une pirouette parfaite pour une sortie remarquée.

Mais Thierry Ardisson ne s’est pas contenté de choisir son jour de départ. Il en avait aussi imaginé la mise en scène. Une photo, prise il y a exactement 20 ans, en 2005, vient aujourd’hui bouleverser le regard du public. Sur la Une de Paris Match à paraître ce mercredi 16 juillet 2025, on découvre une image saisissante : Thierry Ardisson, allongé dans un cercueil, lunettes noires sur le nez, sourire en coin. L’image est réelle, précise le journaliste Nicolas Malabœuf — ni montage, ni création artificielle — mais bien le fruit d’une séance photo organisée par Ardisson lui-même, à une époque où il anticipait déjà sa disparition.

L’ultime provocation ?
Ce cliché étonne autant qu’il fascine. Il illustre à la perfection l’esprit de celui qui, toute sa vie, a mêlé le chic à l’irrévérence, le morbide à l’humour noir, la provocation à la lucidité. Loin d’un simple goût pour le macabre, cette photo est un message clair : même dans la mort, Ardisson reste maître de sa narration. Il scénarise sa sortie comme un dernier épisode de son propre talk-show.

Son enterrement, prévu ce jeudi 17 juillet à 16h30 à l’église Saint-Roch, dans le 1er arrondissement de Paris, aura lui aussi des allures de cérémonie bien pensée. L’accès sera strictement réservé aux invités, a annoncé la famille. Une façon de préserver l’intimité d’un moment personnel, tout en renforçant l’aura mystérieuse du personnage. Un faire-part a été envoyé, fidèle à son style, adressé à ses “amis”… et à ses “ennemis”.

Un homme libre jusqu’à la fin
Dans ce même communiqué, Audrey Crespo-Mara livre un témoignage poignant : “Thierry est parti comme il a vécu. En homme courageux et libre. Avec ses enfants et les miens, nous étions unis autour de lui. Jusqu’à son dernier souffle.” Des mots qui résonnent avec force et rappellent combien Ardisson, derrière la posture et les lumières des plateaux, était aussi un homme profondément attaché à ses proches.

Ce dernier acte, pensé comme une œuvre à part entière, révèle aussi la dimension profondément artistique de l’homme en noir. Depuis Lunettes noires pour nuits blanches jusqu’à Salut les Terriens !, en passant par Tout le monde en parle, Thierry Ardisson a toujours transformé la télévision en un terrain d’expérimentation. Il y a imposé son ton, ses silences, ses audaces, et surtout sa liberté.

L’héritage d’un style inimitable
Au fil de sa carrière, Ardisson a su réinventer le genre de l’interview. Il a mis en lumière des personnalités aussi variées que controversées, avec une constance : celle de ne jamais se contenter du convenu. Il aimait provoquer, mais sans jamais trahir une certaine élégance. Une rareté dans le paysage audiovisuel.

Aujourd’hui, alors que la télévision perd l’un de ses plus flamboyants représentants, le public, les amis, les anciens invités, se remémorent une voix, une silhouette, une attitude. Thierry Ardisson n’était pas simplement un animateur ; il était un style. Une empreinte. Une époque.

Et comme souvent chez ceux qui ont marqué leur temps, sa disparition ne fait que renforcer sa légende. En organisant jusqu’à sa Une posthume, en souriant dans un cercueil préparé vingt ans à l’avance, il rappelle à chacun que la vie, comme la mort, peuvent aussi être des œuvres d’art.

Thierry Ardisson est parti. Mais l’homme en noir, lui, est éternel.