Paris, septembre. Sous un ciel automnal, dans le cadre feutré de l’Hôtel Plaza Athénée, une icône discrète de la télévision française se livre à une rare confidence. Evelyne Dhéliat, la voix familière de la météo de TF1 depuis plus de trois décennies, s’assoit avec une élégance intacte. À 77 ans, ses mots, prononcés avec la précision d’une prévision à soixante heures, font l’effet d’une éclaircie inattendue : “Oui, je me suis remariée. C’est une joie simple, venue tard, mais essentielle.” Huit ans après la disparition de Philippe Maraninchi, l’homme qui a illuminé sa vie pendant un demi-siècle, la présentatrice révèle un chapitre inédit de son intimité, une confidence qui, loin des tempêtes médiatiques, interroge la résilience des cœurs matures.

De Nutbush à la Dame de la Pluie : Une Ascension Silencieuse

Née le 24 novembre 1948 à Paris, Evelyne Dhéliat a grandi dans un quartier modeste du 14e arrondissement. Fille d’un employé de banque et d’une femme au foyer, elle cultive dès l’enfance une passion pour les sciences, une curiosité qui la mène à étudier la géographie à la Sorbonne. En 1967, elle intègre l’Office de la Recherche Scientifique et Industrielle, où ses analyses climatiques attirent l’attention des médias. Son entrée à la télévision, en 1975 sur Antenne 2, marque les débuts d’une carrière qui la verra devenir l’une des personnalités les plus appréciées des Français.

Mais c’est en 1992, sur TF1, qu’elle devient la “dame de la pluie”, un sobriquet affectueux forgé par des millions de téléspectateurs. Ses cartes animées, ses explications limpides sur les anticyclones et les perturbations atlantiques, en font une figure rassurante, presque maternelle, dans un paysage audiovisuel dominé par l’urgence. Derrière ce masque serein, se dessine une existence jalonnée d’épreuves, mais aussi d’un amour indéfectible.

Philippe, l’Ancre d’une Vie

À 20 ans à peine, Evelyne épouse Philippe Maraninchi, un publicitaire charismatique de neuf ans son aîné, rencontré lors d’un stage chez Jacques Séguéla. Leur union, scellée le 15 avril 1970 dans une petite mairie parisienne, défie les conventions d’une époque encore corseté. Philippe, discret mais solide, renonce à une carrière flamboyante pour soutenir l’ascension de sa femme. Ensemble, ils élèvent Olivia, née en 1970, qui deviendra avocate et mère de deux petits-enfants chéris.

“Philippe était mon ancre”, confie Evelyne dans son ouvrage autobiographique “Météo d’une vie”. “Il gérait les coulisses, les dîners solitaires quand je rentrais tard, les crises de doute avant un direct.” Leur complicité, forged dans l’ombre des studios, résiste aux orages de la vie, jusqu’au premier coup de tonnerre en 2012.

La Maladie, puis le Deuil : Des Épreuves Traversées avec Dignité

Cette année-là, un diagnostic de cancer du sein frappe Evelyne comme une onde de choc. Opérée en urgence, elle subit chimiothérapie et radiothérapie, tout en maintenant ses chroniques télévisées. “J’ai présenté la météo avec une perruque, un sourire plaqué”, se souvient-elle dans une interview à “C à Vous”. Philippe, déjà affaibli par un AVC en 2015, devient son pilier invisible. Il l’accompagne aux consultations, cuisine des plats réconfortants, murmure des encouragements. La maladie creuse ses sillons : fatigue chronique, cheveux qui repoussent en mèches rebelles. Evelyne en sort transformée, plus attentive aux vulnérabilités humaines. “Le cancer m’a appris que la vie n’est pas une carte fixe, elle se redessine sans cesse”, analyse-t-elle lors des assises du journalisme, où elle évoque le renouveau du traitement médiatique du climat.

La perte de Philippe, le 11 avril 2017, marque l’apogée de ces épreuves. Âgé de 76 ans, il succombe à un second AVC dans leur appartement haussmannien du 16e arrondissement. Evelyne, alors en plein bulletin du soir, apprend la nouvelle par un appel discret de l’hôpital. Elle termine son direct, impassible, avant de s’effondrer en coulisse. Les funérailles intimes réunissent famille et collègues triés sur le volet. Louis Bodin, son successeur à la météo, témoigne dans “Public” : “Son couple me faisait rêver. Philippe était l’homme qui rendait possible l’impossible”.

Dans les mois suivants, Evelyne navigue en solitaire. Elle publie “La vie en bleu” en 2019, un recueil de réflexions sur le deuil où elle décrit des nuits hantées par l’absence, le lit trop grand, les tasses orphelines sur la table du petit-déjeuner. Professionnellement, elle persévère, intégrant des alertes climatiques urgentes – canicule record de 2022, inondations de 2024 – avec une urgence accrue. À 76 ans, elle forme une nouvelle recrue, Carole Zanon, en janvier, où elle glisse en direct : “Les gens pensaient que c’était mon mari”, en désignant un fidèle compagnon canin, un labrador prénommé Max, acquis post-deuil pour combler le vide.

Jean-Louis : Un Amour Inattendu, une Joie Retrouvée

C’est dans ce cocon recomposé que surgit l’inattendu. Rencontré lors d’une conférence sur le réchauffement climatique, via des cercles communs de la Société météorologique de France, son nouveau conjoint est un ancien collègue. Jean-Louis Martin, 78 ans, ingénieur en climatologie à la retraite, partage avec elle une passion commune et une sensibilité aux défis environnementaux.

Une idylle naissante en 2022, lors d’un voyage d’études en Provence, mûrit en secret. “Nous partagions des silences complices sur les variations isobarques avant de découvrir que l’amour, lui aussi, suit des trajectoires imprévisibles”, explique Evelyne. Le mariage civil, célébré le 12 février 2025 dans une mairie anonyme de Neuilly-sur-Seine, n’invite que dix personnes : Olivia, les petits-enfants, et un prêtre pour une bénédiction discrète. Pas de robe blanche ni de voile, juste une alliance en or blanc gravée d’une boussole stylisée.

Jean-Louis, veuf depuis 2016, apporte une tendresse mesurée, des promenades quotidiennes le long de la Seine, des dîners où l’on décortique les modèles numériques du GIEC. Cette union tardive n’est pas un scandale, mais un miroir sociétal en France, où le veuvage touche deux millions de personnes. Pour Evelyne Dhéliat, ce nouveau mariage est la preuve que le bonheur, même après les plus grandes tempêtes, peut toujours renaître. Une ode à la résilience, à la capacité de l’être humain à se réinventer, et à l’amour qui, comme le temps qu’elle prédit chaque jour, continue de surprendre et d’évoluer, même lorsque l’on croit tout connaître de ses cycles.