L’été dernier, le nom d’Amir – chanteur de 41 ans devenu célèbre grâce à son tube J’ai cherché – s’est retrouvé brutalement happé par une tempête politico-artistique imprévisible. De l’image d’un artiste séduisant le public par sa voix et son charisme sur scène, il est passé à celle d’une cible : appels au boycott, attaques virulentes et accusations clivantes.


Amir se retrouve au cœur de la tempête, pris pour cible par certains artistes et militants pro-palestiniens qui appellent au boycott, l’accusant d’afficher des positions politiques jugées biaisées

 

À l’origine de cette controverse : la participation d’Amir à une soirée de soutien aux soldats de Tsahal ainsi qu’à une manifestation organisée dans la colonie d’Hébron, en 2014. Des images et informations ressorties des archives ont suffi pour le présenter comme un homme ayant « choisi son camp » dans le conflit israélo-palestinien. Conséquence : de nombreux artistes se sont opposés publiquement à sa présence aux Francofolies de Spa (Belgique), allant jusqu’à réclamer son exclusion.

 

Malgré tout, Amir est monté sur la scène des Francofolies. Un silence qu’il a gardé pendant plusieurs semaines, avant de céder sous la pression. Dans un entretien accordé au Parisien le 16 septembre, il a choisi de briser le silence.

« Je commence à m’inquiéter pour mes enfants, pour leur sécurité, puis pour la mienne, quand je vois l’ampleur que tout cela prend », a confié Amir sans détour.

Le chanteur a reconnu la douleur de voir sa carrière jugée non pas à travers sa musique, mais à travers son identité et son histoire personnelle. Il dénonce une injustice, estimant que les attaques ne visent pas son œuvre, mais sa personne.

 


En dehors de la scène, Amir est un père dévoué et un mari attentionné, s’efforçant sans cesse de concilier un emploi du temps chargé avec des instants simples et paisibles auprès de sa petite famille – l’endroit où il se sent le plus en sécurité.

 

Ce ne sont pas seulement sa carrière et sa réputation, mais aussi sa vie privée et surtout sa famille qui se sont retrouvées aspirées dans ce tourbillon de violence symbolique. Amir raconte qu’à partir du moment où la polémique a éclaté, son téléphone n’a cessé de vibrer : réactions politiques, prises de position d’artistes, et, au milieu de tout cela, menaces et insultes.

« Toutes les deux minutes, je recevais un message d’un ministre qui réagissait, ou d’un artiste qui soutenait le boycott. C’était des seaux de menaces et d’injures », explique-t-il.

Dans ce contexte, ce qui l’a le plus bouleversé n’a pas été la fragilisation de sa carrière, mais l’impact sur ses trois enfants : Mikhaël (né en 2019), Or (2022) et Nuri (2025). La question obsédante était : comment leur parler de tout cela ?

« Comment leur dire ce qui se passe sans qu’ils ressentent la violence de la situation, et en même temps sans leur mentir ? »

La seule solution qu’Amir a trouvée fut de leur inventer une version adoucie :

« J’ai dû imaginer une histoire, comme quoi il existait des gens qui n’aimaient pas trop la façon dont papa chante. »

Un mensonge nécessaire, destiné à protéger l’innocence de ses enfants face à la brutalité du monde extérieur.

 


Pour Amir, la famille est le plus grand refuge. Il partage souvent sa fierté pour son épouse et ses enfants, qu’il considère comme une source de force et de motivation pour surmonter les tempêtes, aussi bien dans sa carrière que dans sa vie personnelle.

L’histoire d’Amir dépasse la simple épreuve personnelle. Elle soulève une question brûlante : un artiste peut-il réellement échapper à l’ombre de la politique et de l’Histoire ? Le fait qu’un épisode de 2014 revienne le hanter en 2025 illustre la manière dont le public et certains confrères n’hésitent pas à instrumentaliser la vie privée pour juger un artiste.

 

Entre art et politique, Amir n’a pas eu le choix. Il a décidé de continuer à chanter, à monter sur scène malgré les projecteurs hostiles. Mais derrière la lumière, il ne reste qu’un père épuisé, tentant d’ériger des boucliers fragiles autour de sa famille.

 


L’incompréhension s’est amplifiée à mesure que les réseaux sociaux ont relayé des informations non vérifiées, associant l’image d’Amir à des positions politiques qu’il n’a pourtant jamais exprimées publiquement.

Le 16 juillet, une lettre ouverte signée par plusieurs artistes a dénoncé sa programmation. L’un d’eux confiait à RTBF qu’il se sentait « mal à l’aise » face à la présence d’Amir, après avoir pris connaissance de documents d’organisations militantes, « parce qu’ils évoquent des choses difficiles à accepter ». Selon Le Parisien et Le Figaro, le chanteur de J’ai cherché a été accusé par certains groupes de garder le silence face « aux actions du gouvernement israélien » et d’avoir une position biaisée.

 

Malgré la pression, les organisateurs des Francofolies ont maintenu leur décision :

« Nous n’avons jamais vu Amir tenir un propos de propagande politique sur scène. Et nous ne pouvons pas nous placer en juges de son parcours personnel », ont-ils affirmé.

Alors que les appels au boycott et les attaques sur les réseaux sociaux se multipliaient, d’autres voix se sont levées pour défendre Amir. L’animateur Arthur a réagi avec virulence sur Instagram :

« Ce qui me désespère, ce ne sont pas les imbéciles qui appellent au boycott d’Amir, mais bien le silence du milieu. Chanteurs, auteurs, producteurs, maisons de disques : votre silence est insoutenable ! L’Histoire l’a montré : cela commence toujours par viser des artistes juifs. Et ensuite, cela se propage toujours… »


L’intervention ferme d’Arthur a suscité un nouvel élan de soutien, rappelant aux spectateurs et aux collègues que derrière le chanteur Amir se cache un homme sincère, qui ne mérite pas d’être entraîné dans la tourmente politique.

 

Arthur a ainsi réaffirmé son soutien inconditionnel à Amir dans cette période sensible. Du côté professionnel, ses collaborateurs se sont également exprimés. Antoine Gouiffes-Yan – directeur général de Parlophone et nouveau président des Victoires de la musique – a déclaré au Parisien :

« Parlophone soutient pleinement Amir. Il est triste de voir des artistes appeler à boycotter un confrère. Si Amir n’était pas Israélien, personne n’aurait émis la moindre réserve. Pourquoi attaquer un artiste dont chaque mot prône la paix, le respect et l’harmonie entre les peuples ? Il a toujours parlé avec prudence, humanité et mesure. On ne l’attaque que pour sa nationalité. »

Pierre-Alexandre Vertadier – directeur de Décibels Productions, en charge des tournées d’Amir – n’a pas caché son indignation :

« Ce qui se passe est dramatique. Nous sommes manipulés par des mouvements politiques qui diffusent des informations partielles, biaisées. Je n’ai même pas envie de devoir justifier Amir, car tout cela est absurde. C’est profondément injuste, lui qui a toujours été si mesuré. »

Nazim, ami proche et collaborateur, a quant à lui exprimé son amertume :

« Humainement, Amir est irréprochable, même en coulisses. »


 

Dans cette bataille, Amir semble avoir plus perdu que gagné : une réputation ébranlée, une image divisée, une partie de son public désorientée. Mais sa peur la plus profonde n’est pas la perte de gloire : c’est ce sentiment d’impuissance, en tant que père, de voir ses enfants devenir les victimes collatérales d’une guerre de mots et de préjugés.