Il y a des rôles que l’on n’attend pas, des titres qui vous tombent dessus et qui redéfinissent tout. Pour David Hallyday, l’homme au nom si lourd à porter, l’artiste à la discrétion presque farouche, ce rôle est arrivé à 59 ans. Et il l’a bouleversé. Loin des scènes gigantesques et des guitares électriques, le chanteur savoure aujourd’hui un titre qui le “comble de bonheur” : celui de grand-père.

Dans une rare et touchante interview accordée à “Cine Télérevue”, David Hallyday, actuellement en tournée pour son spectacle “RQM pour un fou”, a mis sa carrière entre parenthèses le temps d’une confession. Et les larmes n’étaient pas loin. Car si la nouvelle est aujourd’hui un bonheur absolu, sa première réaction fut, de son propre aveu, pour le moins surprenante.

“Au début, ça m’a fait bizarre. J’avoue”, a-t-il confié avec un sourire désarmant. Une réaction humaine, presque déconcertante pour cet homme qui incarne le rock’n’roll depuis des décennies. Mais pourquoi “bizarre” ? La raison est simple : “Parce que mes filles sont jeunes”, explique-t-il. Ilona, l’aînée, a 30 ans, et Emma, la cadette, 28 ans. Toutes deux nées de son union avec Estelle Lefébure, elles sont encore, dans l’imaginaire collectif et dans le cœur de leur père, ses “petites”.

Cette sensation d’étrangeté, ce sentiment d’être propulsé dans une nouvelle génération alors qu’il est lui-même en pleine tournée, n’a heureusement duré qu’un instant. La surprise a très vite laissé place à une émotion pure, une joie immense qui semble avoir tout balayé sur son passage. “J’ai eu des enfants très jeunes moi aussi”, rappelle-t-il, comme pour boucler une boucle existentielle.

Et c’est là toute la clé de son bonheur. David Hallyday n’est pas un grand-père qui se voit rangé des voitures. Au contraire. “Et c’est génial de pouvoir profiter de ses petits-enfants”, s’enthousiasme-t-il, le regard déjà pétillant des projets à venir.

Le “papi-rockeur” est né, et il a déjà tout un programme. Loin de l’image du patriarche distant, David se projette dans l’action, dans le jeu, dans le partage. “Ils sont tellement mignons”, glisse-t-il, avant de dévoiler ses plans : “Et puis quel bonheur de pouvoir faire les fous ensemble, faire de la moto… Enfin, pas encore parce qu’ils sont tout petits ! Mais c’est comme ça que je me projette.” L’image est saisissante : le rockeur tatoué, troquant sa grosse cylindrée pour un engin adapté à son petit-fils, Harrison, né de l’amour d’Ilona et de son compagnon Kamran Ahmed.

L’artiste, qui plaisante en disant que “le mini-art, c’est pour bientôt”, a trouvé un équilibre parfait. Il y a la scène, cette passion dévorante héritée de ses parents, et il y a la famille, ce ciment qui l’a tenu debout dans les pires tempêtes.

Car pour comprendre l’intensité de l’émotion de David Hallyday aujourd’hui, il faut se souvenir du chemin parcouru. Être un Hallyday n’a jamais été un long fleuve tranquille. Il est le fils de deux monstres sacrés, Johnny Hallyday et Sylvie Vartan. Une filiation qui est à la fois un héritage incroyable et une ombre écrasante. Toute sa vie, David a dû se battre pour exister par lui-même, pour être “David” avant d’être “le fils de”. Il l’a fait avec sa musique, ses chansons, ses propres tournées, trouvant sa propre voix dans un silence médiatique qu’il a toujours préféré aux éclats de ses pairs.

Et puis, il y a eu le drame. La tempête. La mort de son père en 2017 n’a pas seulement été un deuil intime ; elle est devenue une affaire publique, une guerre d’héritage d’une violence inouïe, étalée sur la place publique. L’épisode du testament, où David et sa sœur Laura Smet se sont vus déshérités au profit de la veuve de leur père, Laeticia Hallyday, a laissé des cicatrices profondes.

Cette bataille judiciaire et médiatique, d’une amertume folle, a profondément marqué l’artiste. Pendant des mois, il a été la cible, l’attaquant, le plaignant, lui qui n’avait jamais rien demandé d’autre que la tranquillité. C’est dans ce chaos que sa propre famille – sa femme Alexandra Pastor et ses trois enfants, Ilona, Emma, et le jeune Cameron – est devenue plus qu’un socle. C’est devenu une forteresse.

Quand David Hallyday, dans cette même interview, confie avec une émotion palpable que la famille est son “refuge”, son “énergie”, son “plus beau refrain”, les mots pèsent d’un poids particulier. Ce ne sont pas des paroles en l’air. C’est le constat d’un homme qui a failli être brisé par les conflits de son ascendance, et qui s’est sauvé en construisant son propre clan, basé sur l’amour inconditionnel et la discrétion.

Dans ce contexte, l’arrivée de son petit-fils, Harrison, n’est pas seulement une joie. C’est une rédemption. C’est la vie qui continue, la preuve que l’amour qu’il a semé, lui, porte ses fruits, loin des rancœurs et des testaments déchirés. C’est la victoire de son “refuge” sur le fracas du monde extérieur.

Aujourd’hui, David Hallyday, 59 ans, n’est plus seulement le “fils de”. Il est le chef de son propre clan, un patriarche jeune et comblé. Il est sur la route pour son spectacle “RQM pour un fou”, mais il l’avoue : “Dès qu’il le peut, il met sa carrière entre parenthèses pour profiter de moments simples, tendres et sincères auprès de sa famille.”

L’homme qui a eu du mal à croire qu’il était grand-père est peut-être, aujourd’Fhui, plus lui-même qu’il ne l’a jamais été. Il a transformé le “bizarre” en “génial”. Il a trouvé, dans les rires d’un tout-petit, une nouvelle énergie, une nouvelle raison de “faire les fous”.

Cette nouvelle paternité par procuration est le “plus beau refrain” d’une vie marquée par la musique, mais définie par la famille. C’est, comme le conclut l’interview, ce “mélange de passion, d’amour et de bienveillance” qui fait de lui un artiste à part, “profondément humain et sincère”. Les larmes qu’il a versées n’étaient pas des larmes de tristesse ou de nostalgie ; c’étaient les larmes d’un homme qui, après avoir traversé l’enfer, touche enfin à son paradis personnel.