Eddy Mitchell, figure emblématique de la chanson française, a récemment levé le voile sur sa relation profonde et fraternelle avec Johnny Hallyday, disparu il y a déjà quatre ans. Bien que réputé pour sa pudeur, Eddy a trouvé les mots et le courage pour écrire une chanson hommage à son ami de toujours, dépassant ses propres limites émotionnelles.

Dans une interview empreinte d’émotion, il raconte leur dernière rencontre, survenue trois jours avant la mort de Johnny. Ils n’ont pas parlé de choses graves, ni de l’avenir, ni de la succession, car Johnny, concentré sur sa survie, n’était pas inquiet de ce que l’avenir réservait. Ce soir-là, ils ont regardé un film ensemble, en silence, dans une atmosphère paisible, respectueuse, presque sacrée. Eddy ne voulait pas l’importuner, il voulait seulement être près de lui.

Leur amitié remonte à leurs années d’adolescence. Ils s’étaient rencontrés lors d’une surprise-partie, chacun apportant ses disques. Un malentendu autour de ces disques provoqua leur premier “clash”, mais aussi le début d’une relation indéfectible. Soixante années d’amitié, rare et précieuse, construites sur une passion commune : le rock and roll.

Eddy décrit Johnny comme un homme au charisme fou, un charmeur, un envoûteur, doué d’une énergie hors du commun. Il était indiscipliné, ne suivant les conseils de personne, vivant à cent à l’heure, avec intensité et liberté. Même très malade, lors de la tournée des “Vieilles Canailles”, Johnny faisait preuve d’une force incroyable. Il subissait sa chimiothérapie en journée et montait sur scène le soir. Une anecdote savoureuse le montre en train de manger huit boudins créoles avant un concert, ce qui le rendit malade, mais pas à cause de son cancer.

Cette tournée fut un moment fort, de rires, de complicité et d’émotion. Ils se soutenaient, Eddy, Johnny et Jacques Dutronc, unis comme des frères. Ils se retrouvaient aussi hors scène, partageant des repas, chantant à cappella des chansons oubliées. Ces moments étaient simples, sincères, nourris par des décennies de souvenirs communs.

Interrogé sur les hommages posthumes, comme les albums ou concerts produits par Laeticia Hallyday, Eddy Mitchell se montre détaché. Cela ne l’intéresse pas, voire le dérange. Il refuse l’idée d’une mémoire exploitée à outrance, la comparant à un folklore morbide. Pour lui, Johnny était un homme libre, et son souvenir devrait le rester, sans mise en scène excessive.

Quant à la mort, Eddy l’aborde avec une philosophie mûre et lucide. Il parle de la “faucheuse” dans ses chansons, l’attend sans crainte mais sans empressement. Il ironise même sur son épitaphe qu’il souhaite voir graver : “Ne me dérangez pas”. Fidèle à lui-même, il préfère qu’on lui fiche la paix, même dans l’au-delà.

Ce témoignage bouleversant met en lumière la beauté des amitiés durables, l’authenticité des liens humains, et la puissance de la musique comme ciment de toute une vie. Eddy Mitchell n’a pas seulement été le collègue d’une légende ; il a été son frère d’âme. Une leçon d’amitié, de vie, et d’élégance dans la fidélité.