On la disait morte. Une rumeur, née sur les réseaux sociaux, avait annoncé son décès, son cercueil prétendument prêt en Ariège. La France a retenu son souffle, une seconde, avant que l’intéressée ne pulvérise elle-même la fake news. Non, Brigitte Bardot n’est pas morte. À 91 ans, elle est bien vivante. Et elle est furieuse.

Depuis La Madrague, sa forteresse de Saint-Tropez devenue sanctuaire pour animaux, l’icône n’a pas seulement démenti sa disparition d’un revers de main cinglant – « Je vais bien et je n’ai pas l’intention de tirer ma révérence ». Elle a surtout lancé l’une de ses attaques les plus frontales, une phrase qui résonne déjà comme un séisme politique : « Deux choses me révoltent en France : la cruauté envers les animaux et le couple Macron. »

L’attaque est brutale, sans filtre, à l’image de la femme qui l’a prononcée. Le couple présidentiel, Emmanuel et Brigitte Macron, réduits à « deux laideurs » qui gouverneraient la France. Le mot est lâché, et il n’est pas esthétique. Pour Bardot, cette « laideur » est morale. C’est celle de l’hypocrisie, de l’inaction, d’une France des salons qu’elle exècre, « pleine de discours et vide d’actes ».

Cette colère n’est pas nouvelle, mais elle a atteint un point de non-retour. La militante infatigable de la cause animale ne supporte plus ce qu’elle considère comme une mise en scène du pouvoir. Elle accuse le couple présidentiel de se contenter de gestes symboliques, de visites de refuges ou de signatures de pétitions, sans jamais oser les réformes de fond qu’elle réclame depuis des décennies : l’abolition de la chasse à courre, la fin de l’élevage en batterie, la fermeture des abattoirs qu’elle qualifie de lieux de barbarie.

Le point de rupture, selon ses proches, serait une rencontre à l’Élysée. Un entretien avec Brigitte Macron où l’ancienne actrice s’est sentie flouée. Elle raconte que la Première dame aurait évoqué avec un enthousiasme poli son livre, « Larmes de combat », tout en évitant soigneusement les sujets qui fâchent. « Elle voulait me flatter, pas me comprendre », aurait soupiré Bardot.

Ce mépris perçu, cette façade polie, a ulcéré celle qui a fait de la franchise son armure. Pour B.B., les Macron incarnent une illusion. De beaux discours, de beaux costumes, mais derrière, le vide. Une indifférence mortifère aux souffrances qu’elle dénonce. En les qualifiant de « laideurs », elle n’attaque pas leur physique, mais leur âme. Et quand on lui demande si elle regrette ses mots, la réponse fuse, légendaire : « Je préfère être insupportable qu’indifférente. »

Cette double explosion – la rumeur de sa mort et son attaque sur l’Élysée – rappelle au monde qui est vraiment Brigitte Bardot. Bien loin de l’image éthérée de la jeune fille qui dansait dans « Et Dieu… créa la femme », la nonagénaire est un roc. Un symbole d’insoumission totale.

Il faut se souvenir qu’en 1973, au sommet absolu de sa gloire, elle a tout quitté. Le cinéma, les paillettes, le statut d’icône mondiale de la libération féminine. Elle a fui un star-système qui la broyait, des médias qui la traquaient, une vie tumultueuse qui laissait des cicatrices. Elle a tourné le dos aux hommes pour dédier sa vie, sa fortune et sa notoriété aux animaux.

La Fondation Brigitte Bardot, créée en 1986, est devenue son véritable rôle. Sa voix, autrefois jugée sensuelle, est devenue rauque à force de crier. Elle est devenue celle des sans-voix. Elle a écrit à tous les présidents, sans distinction. Elle a fustigé Chirac, insulté Sarkozy pour sa « lâcheté », méprisé Hollande. Emmanuel Macron n’est que le dernier d’une longue liste de dirigeants qu’elle juge complices de la « barbarie ».

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Cette constance dans le combat force une forme de respect, même chez ses détracteurs. Car Bardot dérange. Elle agace. Ses positions controversées sur d’autres sujets ont souvent brouillé son message. Mais sur la cause animale, sa sincérité est totale, brute, inflexible. Elle est peut-être la dernière grande figure française à risquer son image et son héritage pour une conviction, sans jamais chercher à plaire.

Aujourd’hui, sa vie à La Madrague est un paradoxe vivant. C’est un havre de paix peuplé de chiens boiteux, d’ânes rescapés et de chevaux aveugles. Un silence que seul le mistral et les cris des mouettes viennent troubler. Mais c’est aussi un quartier général de combat. Ses proches la décrivent comme une « vieille louve blessée mais vivante ». Affaiblie par l’âge et les problèmes de santé – elle a frôlé la mort l’été dernier lors d’une hospitalisation à Toulon – elle n’a rien perdu de son feu.

Chaque matin, elle écrit. Des lettres pour dénoncer, des mots pour remercier les milliers de Français qui lui confient encore leurs espoirs. Veillée par son mari, Bernard d’Ormale, elle observe le monde depuis son rivage, avec un mélange d’amour et de dégoût pour ce pays qu’elle a tant incarné.

Elle ne se fait plus d’illusions. Elle sait le monde « lâche », mais elle refuse de baisser les armes. Elle prépare ce qu’elle appelle son « dernier combat » : faire adopter une loi stricte contre la chasse de loisir. « Je veux partir en ayant obtenu ça », répète-t-elle. Ses amis la supplient de se reposer. Elle rit : « Je me reposerai quand les animaux seront tranquilles. »

À 91 ans, Brigitte Bardot n’est plus une actrice. Elle n’est plus seulement une militante. Elle est devenue une conscience. Son héritage ne se mesurera pas en nombre de films, mais en secousses. Elle a forcé la France à regarder la souffrance animale en face. Elle a prouvé qu’une voix solitaire, même jugée excessive ou dérangeante, pouvait faire trembler les puissants.

Alors que le monde moderne s’agite dans un bruit incessant, Bardot demeure. Immobile, indomptable. Sa dernière provocation contre le couple Macron n’est pas un simple dérapage sénile. C’est un cri. Le dernier rugissement d’une femme libre qui réclame une France plus sincère, plus digne. Et qui, jusqu’à son dernier souffle, refusera l’hypocrisie humaine. La question qu’elle nous laisse, suspendue au-dessus de la Méditerranée, est simple : la France saura-t-elle encore écouter ceux qui osent la déranger ?

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