Il est le “Samouraï”, l’homme au regard d’acier, la légende vivante du cinéma français qui a toujours su protéger ses secrets derrière une façade d’insolence et de mystère. Mais aujourd’hui, à l’heure des bilans, Alain Delon a décidé de ne plus tricher. Dans une confession bouleversante, dépouillée de tout artifice, il revient sur la plus grande blessure de sa vie : Romy Schneider. Loin des mythes et des rumeurs, il livre enfin sa vérité, celle d’un homme qui a aimé, fui, et qui porte depuis des décennies le poids d’une culpabilité inavouée.

“À mon âge, on ne triche plus.” C’est par ces mots qu’Alain Delon ouvre la porte de sa mémoire. Il ne cherche ni rédemption ni excuse, mais simplement à restituer une histoire humaine, trop souvent déformée par la légende. Romy et Alain. Deux prénoms qui claquent comme une évidence, incarnant la beauté, la jeunesse et la tragédie. Mais derrière les photos glacées des magazines, il y avait deux êtres perdus, l’un trop intense, l’autre trop effrayé.

La Rencontre : “Ma Vie Ne M’Appartenait Plus”

Tout commence en 1958, sur le tarmac d’un aéroport. Il l’attend avec un bouquet de roses rouges, maladroit, un peu agacé par ce cirque médiatique. Elle descend de l’avion, star autrichienne adulée, prisonnière de son rôle de “Sissi”. Il la trouve belle, mais c’est sur le tournage de Christine que le foudre frappe.

Delon se souvient de ce moment précis où elle a trébuché et où il l’a rattrapée. Un geste banal qui a scellé leur destin. “J’ai compris que ma vie n’allait plus tout à fait m’appartenir”, confie-t-il. Romy n’était pas une conquête comme les autres. Elle était brute, entière, d’une sincérité désarmante qui bousculait le jeune loup qu’il était. Elle lui a tout donné : sa confiance, son cœur, quittant son pays et sa famille pour le suivre à Paris. Ils étaient “les fiancés de l’Europe”, beaux à en mourir, invincibles.

L’Effondrement Silencieux : La Peur d’Aimer

Mais la gloire est un poison lent. Alors que leurs carrières explosent, la distance s’installe. Alain court après le succès, ivre de reconnaissance. Romy, elle, attend, espère, et souffre en silence de ses absences. Le couple parfait se fissure.

Pendant des décennies, on a dit qu’Alain l’avait quittée pour une autre, par lassitude ou par cruauté. Aujourd’hui, il avoue la vraie raison, bien plus intime et douloureuse : la peur.

“Romy avait une intensité que je n’avais jamais rencontrée. J’avais l’impression que si je restais, j’allais me perdre moi-même,” murmure-t-il. Il n’était pas prêt pour cet amour absolu qu’elle exigeait. Il était jeune, immature, terrifié par la responsabilité de son bonheur. “J’ai eu peur de lui faire du mal, alors j’en ai fait plus encore.”

Cette phrase résonne comme un aveu terrible. Il l’a quittée par lâcheté, par une lettre courte déposée sur une table, fuyant une confrontation qu’il ne pouvait assumer. Il l’a laissée seule face à l’effondrement de son monde.

La Honte et le Silence

Le plus déchirant dans cette confession n’est pas la rupture elle-même, mais ce qui a suivi. Des années plus tard, Romy, apaisée, lui a écrit une lettre de pardon. Elle le remerciait pour ce qu’ils avaient vécu. Alain Delon l’a lue… et n’a jamais répondu.

Pourquoi ? “Parce que j’avais honte,” lâche-t-il, les yeux baissés. “Honte de ne pas avoir été à la hauteur de ce qu’elle était devenue.” Elle avait grandi, mûri dans la douleur, devenant cette actrice immense capable de tout jouer. Lui était resté figé dans son orgueil. Ce silence, cette lettre restée sans réponse, est peut-être son plus grand regret.

“Je Me Suis Senti Responsable”

La tragédie de Romy Schneider, c’est aussi cette fin de vie marquée par le deuil insoutenable de son fils David. Alain Delon était là, dans l’ombre, mais il avoue aujourd’hui s’être senti “responsable”. Pas de sa mort, mais de sa solitude.

“Si j’avais été plus courageux, plus présent, peut-être que certaines douleurs auraient été moins lourdes.” Il sait qu’on ne refait pas l’histoire, mais cette pensée le hante. Il garde précieusement une photo d’elle, prise sur son lit de mort, qu’il ne montre à personne. C’est son lien, son secret, sa manière de lui demander pardon chaque jour.

Un Amour Éternel

Aujourd’hui, Alain Delon ne joue plus. Il parle de Romy comme de la seule femme qui a vraiment compté, celle qui a marqué son âme au fer rouge. “Les autres sont passées. Elle, elle est restée.”

Il ne reste plus de colère, plus de passion dévorante, juste une tendresse infinie et une mélancolie douce. Il sait qu’ils se retrouveront ailleurs. En attendant, il garde ses souvenirs, ses lettres dans une petite boîte, et cette certitude absolue : Romy Schneider lui a appris la chose la plus importante, celle que le “Samouraï” avait tant de mal à accepter : la vulnérabilité. Et ça, comme il le dit si bien, “ça ne meurt jamais”.

L’histoire d’Alain et Romy n’était pas un conte de fées, c’était une histoire vraie, avec ses lâchetés et ses splendeurs. Et c’est pour cela qu’elle nous bouleverse encore, 60 ans après. Parce qu’elle nous parle d’amour, de peur, et du temps qui passe sans jamais effacer les traces de ceux qu’on a aimés.