Le silence assourdissant d’un adieu manqué : quand Dave découvre la mort au chevet de Claude François

Paris, le 19 septembre 2025 — Le temps a beau faire son œuvre, certaines images ne s’effacent jamais. Elles s’incrustent dans la mémoire comme une tache indélébile, une brûlure qui se réveille au gré des souvenirs. Pour le chanteur Dave, cette tache a le visage de Claude François, gisant sans vie dans son appartement parisien. Un tableau morbide, hanté par des cris de douleur et un regard d’une violence muette. Quarante-sept ans après le drame, le silence se brise. Et le récit est aussi troublant que poignant.

L’écho funeste du 11 mars 1978

Le 11 mars 1978. Une date gravée dans le marbre de la chanson française. Ce jour-là, la France est frappée de stupeur. Claude François, l’idole de millions de fans, le “roi du show”, est foudroyé à 39 ans par une électrocution accidentelle. Dans sa baignoire, la vie s’éteint en un instant. Un dénouement tragique, absurde, qui laissera le public orphelin et les proches de l’artiste dans un désarroi total.

Alors que les rumeurs les plus folles circulent, que les fans se pressent devant l’immeuble du boulevard Exelmans, le monde du showbiz est en état de choc. On se souvient de l’énergie débordante, des paillettes, des mouvements chorégraphiés à la perfection. Le vide laissé par “Cloclo” est abyssal.

L’appel qui change tout

C’est dans ce chaos que le téléphone de Dave se met à sonner. Au bout du fil, une voix qu’il connaît bien, celle de Jean-Pierre Bourtayre, l’un des collaborateurs de Claude François. La requête est étrange, presque surréaliste : “Il faut vraiment que tu viennes lui dire adieu.”

Dave n’est pas un ami proche de “Cloclo”. Il le connaît, le respecte, mais leur relation n’a rien d’intime. Pourtant, l’urgence dans la voix de son interlocuteur le convainc. Il se rend à l’appartement, poussé par un mélange de curiosité macabre et de respect pour l’artiste disparu. Il ne se doute pas un instant de l’horreur qui l’attend derrière la porte.

Les coulisses d’un deuil chaotique

À peine a-t-il franchi le seuil que la réalité le frappe de plein fouet. Loin du glamour des plateaux de télévision, l’appartement est le théâtre d’une scène de deuil d’une intensité insoutenable. L’air est lourd, saturé de tristesse. Il n’y a pas de recueillement, mais une cacophonie de douleur.

“Je me souviens surtout de sa mère qui hurlait de douleur”, confie Dave, la voix chargée d’émotion. Les cris de Mme Chouffa, une femme qui a perdu son fils unique, résonnent encore dans les couloirs de sa mémoire. Des cris qui ne sont pas ceux d’une peine silencieuse, mais l’expression brute, animale, de la perte.

Puis, il y a Kathalyn Jones. La fiancée de Claude François. Son regard. Un regard que Dave décrit comme “presque agressif”, teinté d’une douleur qui a dépassé le stade de la tristesse pour devenir une sorte de rage impuissante. Un regard qui ne pardonne pas, qui cherche un coupable, qui veut comprendre l’incompréhensible. Ce regard, Dave ne l’oubliera jamais.

Le linceul de la célébrité

Pendant des décennies, ces images sont restées enfouies. Car il n’est pas facile de parler de la mort. Surtout celle d’une icône. En visitant l’appartement, Dave a vu au-delà du mythe. Il a vu l’homme, dans son corps inerte, loin des projecteurs et des clameurs de la foule. Il a vu la mort d’aussi près que possible, et cette expérience l’a marqué au fer rouge.

“Je n’ai heureusement pas vu beaucoup de morts d’aussi près que j’ai vu Claude…”, avoue-t-il avec une pudeur palpable. Il qualifie l’accident de “monstrueux”, un mot fort qui exprime toute l’horreur et l’absurdité de la situation.

Et si… ?

Aujourd’hui encore, la question le taraude, comme elle taraude des millions de fans : “Que serait devenu Claude François s’il avait vécu ?” Aurait-il continué à innover, à se réinventer ? Aurait-il vieilli sous les flashs des paparazzis, comme d’autres légendes de sa génération ? La réponse, personne ne l’aura jamais.

L’héritage de “Cloclo” ne se limite pas à des succès intemporels comme Comme d’habitude (devenu My Way grâce à Frank Sinatra) ou Alexandrie Alexandra. Son héritage, c’est aussi cette histoire, tragique, hors du commun, qui continue de fasciner et d’interroger. Le témoignage de Dave, bien qu’il soit un “mauvais souvenir”, nous offre un aperçu rare et brutal de l’intimité d’une icône, au moment précis où elle bascule dans la légende. Il nous rappelle que derrière le spectacle et les chansons, il y a toujours des hommes. Et des fins. Tragiques et bouleversantes.