Macronie Sous Tension : Entre « Guerre Agricole » et Défense Passionnée de Brigitte Macron, La Démagogie Fait son Festival

Dans le kaléidoscope incessant des déclarations politiques, la semaine écoulée a offert un nouveau florilège de situations qui, loin d’apaiser le climat social et politique, semblent au contraire attiser les flammes de la controverse. La « Macronie », toujours en quête d’équilibre entre autorité et proximité, a une fois de plus exposé ses contradictions, oscillant entre le discours martial pour les uns et la défense émotionnelle pour les autres. Au cœur de cette agitation, deux figures du gouvernement, la Ministre de l’Agriculture Agnès Pannier-Runacher et la Secrétaire d’État chargée de la Jeunesse et du Service national universel Prisca Thevenot, ont donné le ton d’une exaspération, mais aussi d’une démagogie, que l’on peine à qualifier.

Le constat est implacable : l’exécutif navigue à vue, tentant de rassurer sur des sujets sensibles tout en gérant les dérapages personnels de ses figures tutélaires. La séquence a débuté par un discours qui se voulait fédérateur et fort, mais qui a rapidement sombré dans l’emphase et le doute, avant d’être suivie d’une tentative de justification d’un incident de langage qui touche la plus haute sphère de l’État.

La « Guerre Agricole » : Le Chant des Sirènes Martiales

Agnès Pannier-Runacher a été la première à frapper fort. Devant un parterre d’acteurs du monde agricole, la Ministre a dégainé un vocabulaire qui ne souffre aucune ambiguïté, clamant que « la guerre agricole se prépare ». Si l’intention, sans doute, était de galvaniser les troupes et de souligner la gravité des enjeux de souveraineté alimentaire, la rhétorique choisie a créé un malaise évident.

Utiliser le terme de « guerre » est, dans le contexte actuel de tensions internationales et de crises économiques, une facilité rhétorique qui confine à l’alarmisme, voire à la démagogie. La Ministre a tenté de justifier son propos en parlant de « l’observation lucide du monde » et des « rapports entre nations » qui imposent un « constat implacable ». Elle a dessiné les « quatre murs porteurs d’une ferme France » — les fermes, les usines, les magasins et les consommateurs qui achètent français — comme la seule manière de garantir à la France « l’indépendance et la puissance ».

Mais cette tentative de construction d’un récit de résistance se heurte violemment à la réalité du terrain et aux contradictions de la politique gouvernementale elle-même. Les acteurs du secteur agricole n’ont pas manqué de pointer du doigt l’hypocrisie d’un tel discours. La « guerre » dont parle la Ministre est souvent celle que l’administration mène contre ses propres éleveurs. Les décisions concernant l’abattage de bétail pour des raisons sanitaires, comme les 80 vaches vaccinées contre la dermatose nodulaire dont il est question dans la vidéo, ou l’envoi des forces de l’ordre pour mater les manifestations d’éleveurs, peignent un tableau bien différent de la « ferme France » unie et conquérante.

De plus, l’ombre du traité Mercosur plane toujours, menaçant d’inonder le marché français de produits d’Amérique du Sud qui ne respectent pas les mêmes normes de production, notamment en ce qui concerne l’élevage. Comment parler de « souveraineté de l’agriculture française » et de résistance tout en s’apprêtant à signer des accords qui fragilisent directement les agriculteurs français ? Cette dichotomie entre la parole martiale et l’action concrète sape la crédibilité du gouvernement et expose la rhétorique ministérielle à une critique acerbe, la réduisant à une simple gesticulation verbale.

La Défense de la Première Dame : Quand l’Émotion Devient Argument

Presque simultanément, le feu s’est propagé à l’Élysée par la voix de Prisca Thevenot. La Secrétaire d’État s’est retrouvée sur BFM TV pour réagir à l’un des récents dérapages verbaux de Brigitte Macron. La Première Dame aurait été entendue tenir des propos crus et exaspérés en réaction à ceux qui crient après elle et son mari, employant des termes familiers pour signifier son intention de les « foutre dehors ».

L’incident, qui aurait pu être balayé d’un revers de main, a obligé l’exécutif à monter au créneau. Prisca Thevenot, avec une ferveur que l’on imagine commandée par la nécessité politique, a pris la défense de Brigitte Macron, tentant de justifier ces paroles par l’humain derrière la fonction.

L’argument principal de la Secrétaire d’État fut de faire appel à la compassion : Brigitte Macron est « une femme comme toutes les autres qui pardon a aussi été victime de harcèlement extrêmement fort et extrêmement puissant pendant de nombreux mois et de nombreuses années ». Elle a plaidé que, face à un tel niveau de harcèlement continu, toute personne aurait eu « à peu près la même chose » à dire.

Ce type de défense, bien qu’émotionnellement compréhensible, s’avère juridiquement et politiquement faible. Rappeler le statut de « Première Dame » est essentiel, car il impose un devoir de réserve et une exemplarité que le citoyen lambda n’a pas. Les propos de Brigitte Macron, bien que prononcés dans un moment de frustration, ont été captés et ont révélé un niveau d’exaspération et un langage qui ne sied pas à son rang. De plus, la notion de harcèlement dont elle est victime, bien que réelle, est un phénomène qu’elle partage avec de nombreuses autres personnalités publiques, et qui, paradoxalement, peut être vu comme une conséquence du niveau d’impopularité que le couple présidentiel a atteint.

Prisca Thevenot, en disant « je suis désolée un moment il serait encore plus étonnant [de ne rien dire] » puis « enfin un moment on a envie de dire ça suffit », a non seulement tenté de légitimer le dérapage, mais a aussi traduit la fatigue et la tension qui règnent au sein de l’équipe présidentielle, obligée de défendre bec et ongles les moindres faux pas de la sphère élyséenne. La défense est devenue une plaidoirie en faveur d’un « ça suffit » généralisé, un cri d’épuisement qui révèle que la popularité du couple Macron est telle que la Première Dame « ne peut plus faire un pas dehors sans se faire crier dessus ».

L’Impératif de Cohérence : Le Grand Écart de la Macronie

Brigitte Macron: 10 people accused of calling French first lady a man go on  trial - National | Globalnews.ca

Ces deux séquences, mises en parallèle, racontent l’histoire d’une administration sous pression, obligée de pratiquer un grand écart constant. D’un côté, un discours d’État, martial et stratégique, visant à affirmer une souveraineté agricole en « guerre ». De l’autre, un besoin criant de faire preuve d’humanité et de solidarité envers les siens, quitte à justifier l’usage d’un langage fleuri par la Première Dame.

La Ministre de l’Agriculture utilise l’hyperbole guerrière pour dissimuler les failles de sa politique, tandis que la Secrétaire d’État utilise l’hyperbole émotionnelle (le « harcèlement extrêmement puissant ») pour dissimuler le manque de maîtrise et l’impopularité de son camp. Dans les deux cas, la sincérité du propos est mise à rude épreuve par les faits et les contradictions.

Le public, fatigué de ces mises en scène, ne semble plus être dupe. Le temps où les figures politiques pouvaient se réfugier derrière une simple image est révolu. Les citoyens demandent de la cohérence, de l’exemplarité et, surtout, des actes qui sont en phase avec les discours. Tant que le gouvernement parlera de « guerre agricole » tout en envisageant des traités défavorables, et tant qu’il défendra les dérapages par l’argument de l’« humanité » tout en omettant l’exigence de la fonction, la « démagogie » continuera son festival, érodant un peu plus la confiance dans la parole publique.

Il est temps pour la Macronie de choisir entre le bruit des tambours et la sagesse du silence, entre l’épuisement de la défense ad hominem et la force de l’exemplarité. Car dans cette ère de l’information instantanée, le plus petit des sourires, ou le moindre des jurons, est écouté, analysé et, trop souvent, jugé.