Kendji Girac, les larmes du pardon : “J’ai failli tout perdre, je me suis perdu”

Le silence était assourdissant, presque aussi violent que la détonation qui a failli lui coûter la vie. Depuis cette nuit tragique du 22 avril, la France retenait son souffle, oscillant entre inquiétude et incompréhension. Kendji Girac, l’idole solaire à la voix gitane, le jeune prodige qui a conquis des millions de cœurs avec sa guitare et son sourire, s’était muré dans un silence que seuls les communiqués froids et les titres de presse alarmistes parvenaient à percer. Mais ce silence vient d’être brisé. Dans une vidéo sobre, presque dépouillée, publiée sur ses réseaux sociaux, l’artiste a fait face à son public, à ses démons, et à lui-même. Face caméra, le regard embué et la voix brisée par l’émotion, il n’a pas cherché à fuir. Il a demandé pardon.

“Je regrette vraiment tout ce qui s’est passé”

Ce sont les premiers mots d’une confession de plusieurs minutes, un mea culpa public d’une sincérité désarmante. Loin des scènes illuminées et des disques d’or, c’est un homme meurtri, conscient d’avoir frôlé l’irréparable, qui s’est adressé à ceux qu’il a tant fait danser et chanter. “Depuis mon dernier message, je ne vous ai pas donné de nouvelles car il fallait que je me soigne, et que je réfléchisse à ce qui s’était passé pour comprendre comment j’ai pu en arriver là”, explique-t-il, posément. Le ton est grave, le visage marqué par l’épreuve.

Le chanteur de 27 ans lève enfin le voile sur la spirale infernale qui l’a emporté bien loin de l’image du gendre idéal et de l’artiste joyeux. “Avant l’accident, et depuis quelque temps, j’avais pris de mauvaises habitudes. Je suis rentré dans une spirale que je ne souhaite à personne”, avoue-t-il, sans fard. Ces “mauvaises habitudes”, l’enquête judiciaire les avait déjà nommées : une consommation régulière d’alcool et de cocaïne, des démons insidieux qui ont rongé l’homme derrière l’artiste. “Malgré les conseils de mon entourage, je n’en avais pas du tout conscience, et malheureusement… je me suis perdu.”

Cette perte de contrôle a culminé lors de cette nuit funeste sur une aire d’accueil des gens du voyage à Biscarrosse. Une dispute avec sa compagne, Soraya, la peur panique de la voir partir, et ce geste insensé. Le procureur de la République avait parlé d’une “simulation de suicide” pour l’effrayer, une version que le chanteur confirme à demi-mot aujourd’hui. “J’ai failli perdre la vie. J’ai failli perdre l’amour de ma famille, de mon public, de mes amis. Ma fille a failli perdre son père”, lâche-t-il, la voix étranglée par un sanglot qu’il peine à contenir. Cette phrase, terrible de lucidité, résonne comme l’épicentre du drame. Au-delà de l’artiste blessé, il y a un père qui a vu sa propre fin en face, et surtout, l’abîme dans lequel il aurait pu laisser sa petite Eva Alba.

Un pardon pour se reconstruire

Le cœur de son message est là : une demande de pardon multiple, adressée à tous ceux qu’il a blessés. “Je veux demander pardon, je veux m’excuser auprès de ceux que j’ai blessés, à qui j’ai fait de la peine. Je n’ai jamais voulu ça.” Il s’adresse à sa famille, son pilier, qui a vécu des heures d’angoisse. Il s’adresse à sa compagne, Soraya, involontairement au cœur de la tempête médiatique. Et il s’adresse à son public, ce public qui l’a porté au sommet depuis sa victoire éclatante à The Voice il y a dix ans. “Mon but à moi, c’est de rendre les gens heureux avec un petit bout de chanson ou un sourire.”

Cette prise de parole n’est pas seulement un acte de contrition, c’est aussi le point de départ d’une promesse, celle de la reconstruction. Kendji Girac le sait, les mots ne suffiront pas. La confiance, une fois brisée, se regagne par des actes. “Dieu m’a donné cette deuxième chance”, murmure-t-il, y voyant un signe du destin. “C’est à moi maintenant de vous montrer qui je suis, de regagner votre confiance, parce qu’il faut des actes, et je ferai tout pour être à la hauteur.”

Il assure se faire aider, suivre un traitement pour se soigner physiquement et psychologiquement. La convalescence sera longue, non seulement pour guérir la grave blessure au thorax qui a nécessité une lourde opération, mais aussi pour panser les plaies de l’âme, celles qui l’ont mené au bord du précipice. Le chemin de la rédemption est tracé, et il passe par un retour aux sources, à l’essentiel : la musique. C’est elle qui l’a révélé, et c’est sans doute elle qui le sauvera.

Cette confession publique, rare et courageuse dans un milieu souvent aseptisé, marque une rupture. Elle humanise l’idole, révèle ses failles et sa vulnérabilité. Kendji Girac a touché le fond, mais dans son regard, une lueur d’espoir persiste. L’espoir de redevenir “le garçon qu’il était”, de retrouver la lumière après avoir traversé la plus sombre des tunnels. Son public, touché par cette sincérité brute, semble prêt à lui tendre la main. Car au-delà du drame, l’histoire de Kendji est aussi celle d’une résilience possible, un rappel poignant que même les étoiles les plus brillantes peuvent parfois perdre leur chemin, mais que l’important est de trouver la force de regarder à nouveau vers le ciel. Le premier pas, le plus difficile, vient d’être fait. En larmes, mais debout.