✊ IL A OSÉ PRENDRE LA PAROLE. Alors que le débat sur le retour de Bertrand Cantat déchirait la France, Nagui a choisi son camp sans ambiguïté. Sa déclaration puissante a brisé un tabou et forcé le respect. Un témoignage fort et nécessaire sur la responsabilité des artistes face à leurs actes. L’analyse de cette prise de position est dans le premier commentaire. 👇

Nous sommes le 19 mars 2018. La France est traversée par un débat d’une violence rare, une fracture culturelle et morale autour d’un seul nom : Bertrand Cantat. Le retour sur scène de l’ancien chanteur de Noir Désir, condamné pour les coups mortels portés à sa compagne Marie Trintignant en 2003, divise profondément l’opinion. Sur le plateau de l’émission “C à Vous”, l’ambiance est à l’image du pays : tendue. Et c’est là que Nagui, l’animateur habituellement associé au rire et au divertissement, va prononcer une phrase d’une clarté et d’une fermeté absolues, une phrase qui va résonner bien au-delà du studio : “Dire ‘il y a l’artiste et il y a l’homme’, je ne peux pas l’entendre.”

Un Coup de Poing dans un Débat Empoisonné

Avec ces quelques mots, Nagui ne donne pas seulement son opinion ; il prend position de la manière la plus nette qui soit. Il refuse la rhétorique, alors omniprésente, qui consiste à vouloir dissocier l’œuvre de son créateur, à prétendre que l’on peut admirer les chansons de l’un en oubliant le crime de l’autre. Pour l’animateur, cette distinction est une impossibilité morale, une gymnastique intellectuelle inacceptable face à la gravité des faits. L’homme et l’artiste ne font qu’un, et les actes de l’un rejaillissent inévitablement sur l’autre.

Cette déclaration est un acte de solidarité à peine voilé envers la mémoire de Marie Trintignant et, à travers elle, envers toutes les victimes de violences conjugales. En refusant cette “excuse” de la séparation entre l’homme et l’artiste, Nagui refuse de banaliser, de pardonner ou d’oublier. Pour lui, permettre à Bertrand Cantat de remonter sur scène sans encombre, c’est envoyer un message terrible à la société : celui qu’un crime, même le plus odieux, peut être effacé par le talent.

L’Homme de Conviction derrière l’Animateur

Cette prise de parole n’est pas un hasard. Elle s’inscrit dans le parcours d’un homme qui, derrière son image de gendre idéal, a toujours cultivé des convictions fortes. Connu pour ses combats contre le racisme et toutes les formes de discrimination, Nagui a prouvé ce soir-là que son engagement s’étendait avec la même force à la lutte contre les violences faites aux femmes.

En tant que “poids lourd” du paysage audiovisuel, sa parole a un poids considérable. Il n’est pas seulement un animateur ; il est aussi un programmateur influent, notamment via son émission sur France Inter. Sa déclaration n’est donc pas que philosophique, elle est aussi une prise de position professionnelle. Elle signifie que sur ses ondes, sur ses plateaux, la musique de Bertrand Cantat n’aura pas sa place. C’est un acte de boycott assumé, qui a sans doute influencé d’autres programmateurs et directeurs de festivals à l’époque.

Un Débat plus Grand que Cantat

La position de Nagui, si tranchée soit-elle, est venue éclairer un débat complexe qui dépasse le seul cas de Bertrand Cantat. Peut-on encore regarder les films de Polanski ? Écouter la musique de Michael Jackson ? Lire les écrits de Céline ? La question de la responsabilité de l’artiste face à ses actes et de la postérité de son œuvre est l’une des plus épineuses de notre époque.

Ceux qui défendaient le retour de Cantat mettaient en avant le principe de la réinsertion, le fait qu’il avait purgé sa peine et “payé sa dette à la société”. Ils défendaient une vision où l’œuvre, une fois créée, appartient au public et transcende les fautes de son auteur.

Nagui, par sa déclaration, a balayé cet argumentaire d’un revers de main, le jugeant inaudible face à la souffrance des victimes. Il a incarné une autre vision, celle où la responsabilité morale et sociale de l’artiste ne s’éteint jamais. Ce jour-là, sur le plateau de “C à Vous”, il n’était plus l’animateur de “N’oubliez pas les paroles”, mais un citoyen et un homme de médias qui a utilisé sa voix pour porter un message clair, courageux et profondément humaniste. Un message qui, des années plus tard, continue de résonner.